Jean Debernard – Simples soldats
© Actes Sud, 2001
Un texte bref, sobre, écrit au présent pour raviver un souvenir collectif de la guerre d’Algérie. Dans ce récit vécu, l’auteur décrit de jeunes soldats rappelés, c’est-à-dire l’armée de réserve et non des professionnels.
Ce passage présente l’environnement, un lieu qui s’appelle Lacroix, dans lequel arrive les nouveaux soldats qui ne savent rien de la guerre. Ils se montrent capables du meilleur comme du pire.
Première lecture :
Débarquez.
L’armement, le paquetage1. Leurs affaires rassemblées. Les camions font demi-tour, pressés de repartir quand leurs hommes-chargement sont arrivés à destination.
Livrés à eux-mêmes.
Du haut de sa jeep, dont il n’aime pas descendre, le lieutenant-colonel, chef de bataillon, leur donne l’ordre de se débrouiller. Parce que ici, désormais, vous êtes chez vous. Ce lieu-dit2 s’appelle Lacroix. C’est votre nouveau poste. Aménagez-le. Barricadez-le. L’unité que vous relevez vient d’être déplacée, plus au sud. Elle a connu des ennuis avec les salopards3 du coin. Faites-le-leur payer.
En quête de réconfort, les rappelés ne voient que de mauvaises mines4. Ce sont les leurs. Autour d’eux les bâtiments s’écroulent. Des pans5 de murs noircis mais pas d’être vivant.
1le paquetage – l’ensemble des affaires qu’un soldat doit porter personnellement
2un lieu-dit – un endroit délimité administrativement
3un salopard – Une personne sans scrupule, un sale type, un salaud.
4de mauvaises mines – des visages tristes et fatigués.
5des pans – des morceaux, des parties