Françoise Le Roux
D’accord est un adverbe. Le mot signifie que l’on donne son accord à une idée. C’est l’expression d’un acquiescement.
Par exemple, vous invitez un nouveau collègue, un jeune enseignant, à se joindre à vous pour faire connaissance à la rentrée des classes :
Nous organisons une petite réunion de rentrée à la salle des profs chaque année, chacun apporte ce qu’il veut, vous viendrez ?
ce à quoi il répond aimablement :
D’accord ! C’est gentil.
On peut être d’accord avec quelqu’un, avec un projet, mais on peut aussi ne pas être d’accord et protester tout en expliquant pourquoi on est en désaccord.
On cite une phrase attribuée à tort à Voltaire, et cette phrase est citée si fréquemment comme étant de Voltaire qu’elle impose d’être restituée à Evelyn Beatrice Hall dans son livre The Friends of Voltaire, publié en 1906 sous le pseudonyme de S. G. Tallentyre.
L’autrice prête à Voltaire la déclaration que, selon elle, il aurait fait lui-même à l’abbé Le Riche dans une correspondance datée du 6 février 1770 :
Monsieur l’abbé, je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire.
Interrogée sur cette citation introuvable dans la lettre authentique nommée, elle reconnut qu’elle n’aurait peut-être pas dû y placer des guillemets.
Si la paternité de Voltaire est à juste titre contestée, du moins son admiratrice cherche-t-elle à rendre compte de la lutte du philosophe pour la liberté d’expression.
En grammaire : l’accord du participe passé
Pour commencer, il faut savoir ce qu’est un participe en grammaire. C’est un mode de conjugaison. C’est la forme d’un verbe.
Il y a plusieurs modes de conjugaisons : l’indicatif (je chante); le subjonctif (il faut que je comprenne la question); le conditionnel (nous aimerions tant voir la mer); le participe passé (les touristes sont arrivés dimanche; les vacances ont commencé jeudi dernier). Et quelques autres modes de conjugaisons.
Dans les derniers exemples ci-dessus, arrivés et commencé sont des participes passés. Pourquoi des participes ? Pour le comprendre il faut savoir que le verbe participer a deux sens.
On peut participer à quelque chose, à un jeu, par exemple. Cela signifie que l’on prend part à un jeu.
L’autre sens est participer de quelque chose. Cela signifie être de la même origine, avoir la même nature. C’est ce deuxième sens qui nous intéresse.
On peut dire que le participe passé a une nature d’adjectif qualificatif. Il participe d’un adjectif qualificatif. En effet, il peut s’accorder en genre et en nombre. Les touristes sont arrivés (masculin pluriel), un touriste est arrivé (singulier), une touriste est arrivée (féminin singulier), des touristes sont arrivées (pluriel de une touriste, ce sont des dames).
D’autre part, le participe passé a aussi une nature verbale, une nature de verbe. Il entre dans la construction de verbes composés, de verbes conjugués au passé. Le passé composé : les touristes sont arrivés ; le plus que parfait, les vacances avaient commencé. Et d’autres temps du passé, le passé antérieur, le conditionnel passé.
Notez que le participe passé s’emploie aussi couramment sans auxiliaire comme un simple adjectif qualificatif. Par exemple :
L’an passé (ou l’année passée), il a neigé abondamment.
Une fois le travail accompli, on peut se reposer tranquillement.
Les vacances finies, il faut songer à la rentrée sérieusement.
Pour résumer, le participe tient du verbe et de l’adjectif, comme un enfant tient de son père et de sa mère.
Revenons à nos moutons ! Quid de l’accord du participe passé dans les conjugaisons?
Si le verbe utilise l’auxiliaire être (les touristes sont arrivés), le participe passé s’accorde en genre (masculin ou féminin), et en nombre (singulier ou pluriel) avec le sujet du verbe.
Si le verbe utilise l’auxiliaire avoir, le participe passé ne s’accorde jamais avec le sujet du verbe.
En revanche, il s’accorde avec le COD (le complément d’objet direct) lorsque ce dernier est placé avant le verbe. Par exemple :
Nous sommes récompensés des efforts que nous avons faits . Nous les avons faits courageusement pour améliorer nos conditions de vie, même si nous avons commis des erreurs parfois.
Maintenant, il faut bien identifier ce qu’est un COD. C’est un complément d’objet direct. Ce n’est pas un COI, complément d’objet indirect. La différence entre les deux, c’est qu’il n’y a pas, dans le COD, de préposition (à ou de ou autre chose, pour, avec) entre le verbe et son complément d’objet.
Nous avons fait des efforts (Faire des efforts, c’est direct). Nous les avons faits.
Ou encore :
Ces erreurs, nous les avons commises.
Attention : Bien identifier le complément d’objet indirect, le COI
Moi, si patiente (féminin singulier) d’habitude, je ne sais pas ce qui m’a pris de m’énerver.*
et non pas ce qui m’a prise, car m’ n’est pas le complément d’objet direct mais un complément d’attribution (à moi) donc le participe passé (pris) ne s’accorde pas. Il reste invariable.
*L’exemple est extrait du petit livre L’accord du participe passé en 100 exercices, exemples et corrigés, de Bénédicte Boudou. Collection PROFIL 501 PRATIQUE chez HATIER
Illustration
De Jean de La Fontaine
Voir aussi : F comme dans… sauf | O comme… trop, c’est trop! | L comme… la langue, oui mais laquelle? | G comme… la grenouille, pardi!
Le chat, la belette et le petit lapin
Du palais d'un jeune Lapin Dame Belette un beau matin S'empara ; c'est une rusée. Le Maître étant absent, ce lui fut chose aisée. Elle porta chez lui ses pénates un jour Qu'il était allé faire à l'Aurore sa cour, Parmi le thym et la rosée. Après qu'il eut brouté, trotté, fait tous ses tours, Janot Lapin retourne aux souterrains séjours. (le terrier du lapin, son logis) La Belette avait mis le nez à la fenêtre. Ô Dieux hospitaliers, que vois-je ici paraître ? Dit l'animal chassé du paternel logis : Ô là, Madame la Belette, Que l'on déloge sans trompette, (rapidement) Ou je vais avertir tous les rats du pays. La Dame au nez pointu répondit que la terre Était au premier occupant. C'était un beau sujet de guerre Qu'un logis où lui-même il n'entrait qu'en rampant. Et quand ce serait un Royaume Je voudrais bien savoir, dit-elle, quelle loi En a pour toujours fait l'octroi (l’attribution) A Jean fils ou neveu de Pierre ou de Guillaume, Plutôt qu'à Paul, plutôt qu'à moi. Jean Lapin allégua la coutume et l'usage. Ce sont, dit-il, leurs lois qui m'ont de ce logis Rendu maître et seigneur, et qui de père en fils, L'ont de Pierre à Simon, puis à moi Jean, transmis. Le premier occupant est-ce une loi plus sage ? - Or bien sans crier davantage, Rapportons-nous, dit-elle, à Raminagrobis. (Nom du chat) C'était un chat vivant comme un dévot ermite, Un chat faisant la chattemite, (l'hypocrite) Un saint homme de chat, bien fourré (avec une épaisse fourrure), gros et gras, Arbitre expert sur tous les cas. Jean Lapin pour juge l'agrée. Les voilà tous deux arrivés Devant sa majesté fourrée. Grippeminaud (autre nom pour le chat) leur dit : Mes enfants, approchez, Approchez, je suis sourd, les ans en sont la cause. L'un et l'autre approcha ne craignant nulle chose. Aussitôt qu'à portée il vit les contestants, Grippeminaud le bon apôtre Jetant des deux côtés la griffe en même temps, Mit les plaideurs d'accord en croquant l'un et l'autre. Ceci ressemble fort aux débats qu'ont parfois Les petits souverains se rapportant aux Rois.