Il y a comme un goût amer en nous
Comme un goût de poussière dans tout
Et la colère qui nous suit partout
Y a des silences qui disent beaucoup
Plus que tous les mots qu’on avoue
Et toutes ces questions qui ne tiennent pas debout
Évidemment
Évidemment
On danse encore
Sur les accords
Qu’on aimait tant
Évidemment
Évidemment
On rit encore
Pour les bêtises
Comme des enfants
Mais pas comme avant
Composée par Michel Berger après la mort brutale de Daniel Balavoine, chantée par France Gall, Évidemment dit encore ce que nous ressentons aussi pour l’attentat survenu à Manchester en Angleterre en ce mois de mai.
L’orthographe et la prononciation
Curieusement, la lettre e est en fait plusieurs lettres du point de vue de l’écriture et de la prononciation. C’est à cause des accents: l’accent grave de la rivière ou l’accent circonflexe, un chapeau sur la tête, qui se prononcent pareil. Et l’accent aigu de l’été.
Je vous renvoie à mon dictionnaire de prononciation en cliquant sur l’onglet Leçons, puis sur dictionnaire de prononciation
Notez également que dans évidemment, l’un des -e se prononce a, tout comme dans une femme. C’est le propre des adverbes formés sur des adjectifs qui se terminent en -ent, comme:
- fréquent / fréquemment
- intelligent / intelligemment.
Les adverbes formés sur des adjectifs en -ant se terminent en -amment, comme:
- savant / savamment
- galant / galamment.
Je vous renvoie à mon dictionnaire de prononciation en cliquant sur l’onglet Leçons, puis aller au cours débutant n°6.
J’attire votre attention sur l’orthographe car, il faut se rendre à l’évidence, ici la langue écrite a son importance pour bien parler.
Prenons le temps d’examiner l’expression ci-dessus se rendre à l’évidence, elle a un équivalent en anglais “to bow to the evidence”, et donne l’idée d’une défaite (surrender).
Se rendre a dans ce cas la signification de perdre la partie, accepter la supériorité incontestable de l’évidence contre laquelle on ne peut pas lutter, parce que c’est ce qu’on a sous les yeux, c’est visible, tangible, c’est là devant moi, je ne peux pas le nier. (Le mot vient du latin video, je vois)
Le vocabulaire
Nous avons aussi l’obvie, même si on l’emploie rarement car c’est plutôt un niveau de langage savant.
Roland Barthes, un sémiologue, a écrit un ouvrage intitulé L’obvie et l’obtus, à propos de la compréhension de ce qui est visible (une photo, un tableau, une image) ou audible comme la musique. Il écrit:
Le sens symbolique s’impose à moi par une double détermination : il est intentionnel (c’est ce que l’auteur veut dire) et il fait partie des symboles communs. Je propose de l’appeler le sens obvie. Quant à l’autre sens, j’ai du mal à l’absorber, il est têtu et fuyant, lisse et échappé, je propose de l’appeler le sens obtus”.
Nous retrouvons le mot obtus, le féminin obtuse dans d’autres registres, comme la géométrie. Il y a un angle obtus, celui qui mesure plus de 90 degrés, donc supérieur à l’angle droit, donc moins pointu, moins pénétrant. Si c’est un objet il devient glissant, lisse. Ce sens concerne aussi l’esprit. On appelle un esprit obtus, un esprit qui manque de pénétration, qui ne comprend pas. Une intelligence obtuse.
Un point culturel
L’organisation d’un bon repas fait toujours débat : faut-il rester au même vin, peut-on en changer au cours du repas? L’avis de Brillat-Savarin, célèbre gastronome du dix-huitième siècle, nous éclaire :
Prétendre qu’il ne faut pas changer de vin est une hérésie: la langue se sature et après le troisième verre, le meilleur vin n’éveille plus qu’une sensation obtuse.”
Jean Anthelme Brillat-Savarin
Après le troisième verre, tout de même, on doit changer. Mais combien de fois change-t-on? Quelle santé avaient nos ancêtres!
A la vôtre! Et à bientôt!