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Vendu! Pour 60 000 mille euros, un très beau tableau de l’artiste Bernard Buffet. Les Oiseaux date des années soixante, les années les plus cotées pour Buffet, donc c’est un prix fort.
Toutes les semaines, dans toutes les grandes villes de France des objets d’art- des tableaux, des meubles, des livres – sont mis en vente aux enchères. Les plus importantes ventes sont attendues avec impatience par les connaisseurs dont les motivations sont diverses:
C’est surtout que je suis collectionneur, et donc quand j’ai l’occasion de voir quelque chose qui me plaît, je viens voir… et puis, si je peux acheter, j’achète.
Pour regarder toute l’exposition, étant donné qu’il y avait des tableaux de Vlaminck, de Carzou et tout ça, enfin des choses intéressantes à voir, donc, c’est plutôt comme si j’allais à un musée, parce que malheureusement, mes moyens ne me permettront pas de les acheter. Je viendrai quand même pour voir un peu la cote des choses.
Il peut y avoir des choses de successions qui viennent directement des privés. On a une galerie dans le centre ville…
C’est pour l’objet. C’est pas pour l’excitation ni pour le prix. C’est parce que ce sont des jolies choses et qu’on peut les avoir moins cher que chez un antiquaire.
De la peinture … Il y en a plusieurs que je cherche, mais là, disons, il y a des Vlaminck qui sont intéressants, des Enjolras, enfin il y a pas mal de choses, Cassigneul, enfin des peintres modernes.
C’est une paire de fauteuils qui est estimée autour de 7000-8000 francs, j’irai jusqu’à 10 000 francs.
Aujourd’hui on est à Lyon, à la salle des ventes de Jean-Claude Anaf, un des commissaires-priseurs vedettes du circuit. C’est un homme du métier qui aime chaque objet en soi, et qui ne veut pas que les uns fassent de l’ombre aux autres:
Je crois que tous les objets que je vends me font plaisir déjà. Donc ça, c’est un élément essentiel, parce que un bon commissaire-priseur, s’il ne se fait pas plaisir en vendant tous ses objets, je crois qu’il faut qu’il fasse impérativement autre chose. C’est pas forcément les objets les plus importants qui me font plaisir…
Mais malgré cette impartialité exemplaire, il y a quand même des objets qui sortent du lot:
Si on veut parler d’importance, effectivement, il y a plusieurs choses qui sont importantes, notamment un très beau tableau de Chagall, vous avez également un superbe bureau d’époque Empire avec une garniture de bronze (à décor d’attribut guerrier) qui est aussi somptueuse, vous avez un guéridon d’époque Louis XVI en bronze doré à décor de tête de Méphisto ou de… et de bélier, pardon. Vous avez un panel aussi de tableaux anciens notamment des natures mortes* qui vous font plaisir, vous savez… C’est une vente, si vous voulez, très homogène et très diversifiée qui part, globalement on va dire, du XVIème au XXIème siècle.
Jusqu’à l’année dernière tous les commissaires-priseurs étaient fonctionnaires de l’État. Mais maintenant, pour se conformer aux règles de l’Union Européenne, la France a ouvert le marché des enchères à la concurrence du secteur privé et de l’étranger. Donc, on sera de plus en plus obligé d’être performant pour survivre. Ce qui ne fait pas peur à Maître Anaf:
La clé de la réussite, vous savez, je crois qu’il n’y a pas de mystère dans la vie. Je crois que c’est le travail, encore le travail et toujours le travail, bon, ça je crois que c’est primordial, pour un chef d’entreprise. La deuxième chose, bon, effectivement j’ai une passion qui existe toujours après encore 25 ans de carrière, c’est la vente, parce que la vente est excitante et quelle que soit la vente. C’est pas parce que vous allez vendre un objet à plusieurs millions d’euros que c’est excitant. Un objet de quelques euros, c’est aussi excitant, parce que vous avez des rapports avec le public vous avez un espèce de feeling entre le public et le commissaire-priseur qui fait que, bon eh bien, selon l’attitude du commissaire-priseur, bien souvent aussi la vente va fonctionner ou pas fonctionner, voilà, ça c’est toute une sensibilité qu’un commissaire-priseur peut avoir vis-à-vis du public qui est en face de lui, voilà.
Maître Anaf n’accepte pas l’idée que le monde des enchères soit un monde de professionnels où les particuliers feraient mieux de ne pas entrer.
Écoutez, les professionnels sont très peu présents, hein. Ils représentent à peu près à peine 10% des personnes qui acquièrent des objets pendant mes ventes. Nous avons essentiellement affaire à une clientèle, on va dire, de particuliers ou une clientèle internationale qui gère les enchères directement par téléphone.
Il a conseillé sagement ceux qui veulent faire un peu d’exploration:
… Dans un marché d’antiquaire ou… peu importe… ils ont effectivement plus le temps de regarder l’objet, de revenir plusieurs fois et de réfléchir. Et il est bien évident que, dans le cadre d’une vente aux enchères, les expositions sont quand même relativement limitées. Elles durent deux jours, deux jours et demi, donc ça leur donne quand même un certain laps de temps. Maintenant au moment de la vente effectivement, c’est… la vente par elle-même d’un objet dure globalement -ça va vous amuser- à peu près… aux alentours d’une minute, d’une minute trente. Donc il faut qu’ils aillent très vite.
Je crois que pour ne pas se laisser emporter, parce que, bon, effectivement une enchère peut monter très haut parce que vous allez avoir une, deux, trois personnes qui vont vouloir cet objet. Donc, il est bien évident que le commissaire priseur ne va pas dire arrêtez, c’est trop cher! C’est la loi des enchères et ça sera le vrai prix de l’objet. Bon, maintenant quand on est dans des enchères courantes, je crois que les gens sont suffisamment avertis pour savoir, d’abord pour s’être renseigner pour savoir quelle est l’estimation de cet objet. Quand je leur dis, eh bien, cet objet vaut, peut-être, je ne sais pas, entre 5000 et 8000 euros, parce que c’est pas une science infuse l’estimation, bon, l’expertise, enfin l’estimation plutôt… A partir de ce moment-là, ils se disent, bon, eh bien, il a estimé ça entre 5000 et 8000 euros, estimation basse, estimation haute, bon, eh bien on va l’acheter à 5500 – 6000. Là, à partir de ce moment-là ils auront fait une affaire correcte, même peut-être bonne. Bon, maintenant s’ils l’achètent 15000 euros, c’est leur problème, c’est plus le mien, voilà.