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Si vous visitez la côte ouest de la France, au nord de la Rochelle, et si vous attendez que la marée baisse, vous allez voir un paysage insolite … des milliers de grands morceaux de bois – des pieux – sont plantés dans la mer. On dirait une forêt.
Ici, dans la Baie de l’Aiguillon, c’est le plus grand centre en France pour la culture des moules.
Et si vous voulez en savoir plus, une visite dans le village d’Esnandes s’impose. Là, vous allez trouver la Maison de la Mytiliculture et – si vous avez de la chance – la très savante Nelly, la responsable de ce musée:
Mytiliculture, c’est la culture des moules. Donc, avant, on appelait ça, ceux qui cultivaient les moules, ‘les boucholeurs’ mais depuis que beaucoup de techniques se sont modernisées, donc, c’est les mytiliculteurs. Donc, c’est culture des moules puisque ça vient du mot latin mytilus edulis.
D’abord, les mytiliculteurs posent des fils pour capturer les bébés moules, qui se constituent dans l’eau de mer à partir des sécrétions émises par les moules mâles et femelles. L’importance de la région pour capter les petites moules vient des conditions qui sont parfaites:
Ce sont des grandes cordes en chanvre ou en fibre de coco que l’on met pour capter le naissain. Pour réussir ce captage, il faut surtout avoir une eau de mer tempérée, et nous, vu qu’on est protégés des courants froids par l’île de Ré, on réussit absolument ce captage.
Puis on enroule les fils avec les toutes petites moules, juste nées, sur les pieux de bois pour qu’elles grossissent. Tout le secret est dans le phénomène des marées. La mer monte et descend toutes les six heures.
Quand la mer est haute, les moules se nourrissent, mais il faut pas oublier que quand le mer est basse, le soleil a vraiment une très grosse importance puisque le soleil, quand le pieu est à découvert, il va chauffer les coquilles, il va durcir les coquilles, ils va les rendre noires-bleues et très dures… Il va chauffer aussi la nacre qui est à l’intérieur de la coquille. Il va chauffer aussi l’eau et la moule par elle-même. Et c’est l’ensemble chauffé qui donne le bon goût à la moule de bouchot.
C’est une technique qui date du Moyen Age. C’est un Irlandais naufragé en France qui a inventé cette manière de cultiver ces excellentes moules.
C’est un Irlandais, Patrice Walton, qui a fait naufrage entre Esnandes et Charron. Il s’est aperçu que sur les pieux qui tenaient ses grands filets, qu’il y avait des moules qui se collaient et qui grossissaient beaucoup plus vite que les moules sauvages qu’il ramassait. Donc, tout bêtement, ce qu’il a fait, il a remis des pieux. En 1137 ou 1237.
Aujourd’hui c’est une grande industrie, et pour les raisons de santé publique, c’est une industrie bien réglementée:
Les bouchots sont sur un terrain du domaine maritime. Ce sont des concessions louées, bien sûr, au domaine maritime. Ce sont des concessions qui sont louées pour vingt-cinq ans. Maintenant, les jeunes qui démarrent dans la profession ne peuvent pas reprendre la succession du père sans être passés par une école maritime qui va leur donner le droit de pouvoir exercer ce métier, alors qu’avant ça se faisait de père en fils. Maintenant c’est très très réglementé.
Il y a une concurrente à la moule de bouchots, c’est la moule de filière. La moule de filière grossit sur de longs fils flottants en mer. Elles sont donc toujours dans l’eau et elles grandissent rapidement. Mais pour les connaisseurs, ce n’est pas la même chose …
Les moules de filière, les moules qui sont cultivées sur cordages en pleine mer vont, elles, être, beaucoup plus grosses puisqu’elles sont toujours en train de se nourrir, hein, et, mais elles ne seront pas aussi bonnes au point de vue du gustatif.
Et la bonne saison pour manger les moules, c’est justement maintenant:
Les moules femelles pondent au printemps, donc je vous dis… fin mars, début avril, et ensuite on (ne) mangera ces moules-là que l’année d’après à partir du quinze juin.
Bien sûr, où* les moules sont meilleures, c’est l’été, grâce au soleil comme je vous ai expliqué, qui va donner ce bon goût à la moule de bouchots.