Version Ralentie
Tantôt allemande, tantôt française, l’Alsace a changé de patrie au cours de l’histoire, mais pas d’identité. Elle a même gardé une législation à part. En Alsace, on trouve encore des crucifix dans les écoles et les prêtres sont nommés et payés par l’État ; tout cela n’existe plus dans le reste de la France, où Église et État sont administrés indépendamment depuis 1905.
Sometimes German, sometimes French, Alsace has changed country during the course of history, but not identity. It has even kept a separate legal system. In Alsace you still find crucifixes in schools and priests are chosen and paid for by the state; all that doesn’t exist in the rest of France, where the Church and the State have been administered independently since 1905.
-C’est l’histoire de mes parents, mes parents qui sont nés tous les deux à Strasbourg. Pour des raisons professionnelles -mon père était gendarme- donc il a beaucoup navigué à gauche à droite, et à la retraite venue, ils sont retournés en Alsace. Moi, je ne suis pas né en Alsace mais j’avais toute ma famille qui habitait l’Alsace, ma grand-mère, ma grand-mère maternelle était alsacienne. Mais sinon1, oui, toute ma famille est d’Alsace. Ce qui est typique c’est qu’en Alsace, c’est une vallée qui est comprise entre deux chaînes de montagnes qui culminent à 1 000 mètres environ, 1 400, et ce qui fait que, ce que je vis ici, par exemple, c’est des levers de soleil et des couchers de soleil qui sont à l’horizon ; alors qu’en Alsace, comme on était très vite au piémont, dans les piémonts, au pied de la montagne, le soleil se levait plus tard… enfin passait la ligne des montagnes plus tard, et le soir, il se couchait plus tôt, puisqu’il passait la ligne des montagnes, puisque c’est une vallée qui est orientée nord-sud donc on ne vivait pas les mêmes couchers de soleil, quoi.
-It’s the story of my parents, my parents who were both born in Strasbourg. For professional reasons, my father was a policeman, – so he’d moved around right, left and centre – and when retirement came, they returned to Alsace. I wasn’t born in Alsace but I had all my family who lived in Alsace, my grandmother, my maternal grandmother is Alsatian. What’s characteristic is that in Alsace, it’s a valley which is contained within two mountain ranges that peak at around 1000 metres approximately, 1400 and that means that, what I experience here, for example, are sunrises and sunsets which are on the horizon; whereas in Alsace, as you are very quickly in the foothills, at the foot of the mountains, the sun rises later… well passes over the mountain tops much later and in the evening, it sets much earlier, because it crosses behind the mountain tops, because it is a valley which points North South, you don’t experience the same sunsets.
-J’habite à côté de Mulhouse, c’est en Alsace. Ce n’est pas en Allemagne parce que, souvent, on se trompe à Paris. Sur Internet, nous avons un site où j’ai mis un dictionnaire qui va du français à l’alsacien et de l’alsacien au français en y mettant tous les mots qui reviennent, parce que moi personnellement je ne pourrais pas faire un dictionnaire pour le strasbourgeois, je ne connais pas la langue assez, avec autant de perfection qu’un Strasbourgeois et donc, notre dictionnaire, il est haut-rhinois2. Mais il y aura des mots3… je ne sais pas, je crois que je suis aux 38 000 mots, c’est des mots qui me reviennent de mes parents et de mes grands-parents. Au fur et à mesure que ça me rentre dans la tête, hé ben je rectifie… Parce que si vous faites un dictionnaire imprimé, c’est fini tandis que là, sur l’internet, on peut changer tout le temps, remettre, remettre… Et c’est pour cela qu’un dictionnaire de cette sorte est une richesse.
-I live near Mulhouse, which is in Alsace. It’s not in Germany, because people from Paris often get that wrong. On the Internet, we have a site where I put a dictionary which goes from French into Alsatian and Alsatian into French, by putting there all the words that come to mind, because I personally couldn’t do a dictionary for Strasbourgeois, I don’t know the language well enough, as perfectly as someone from Strasbourg and so our dictionary is for the Upper Rhineland. But there must be… I don’t know, I think that I’m at 38,000 words, they’re words that come down from my parents and grandparents. As and when they enter my head, well I rectify… Because if you do a printed dictionary, it’s finished, whereas on the internet, you can change things all the time, put more and more… and that’s why a dictionary of this kind is very rich.
Moi, ce qui m’avait beaucoup marqué, et puis, que j’ai beaucoup vécu en Alsace, c’est le bilinguisme, c’est-à-dire, que ce soit par le patois ou par l’allemand. Il y a beaucoup d’Alsaciens qui parlent allemand ou le patois qui est germanique, donc ça fait qu’on passe facilement la frontière, il n’y a pas la barrière de la langue. Et même pour ma femme qui était pas alsacienne, qui parlait pas allemand, elle allait en Allemagne et elle trouvait toujours quelqu’un qui parlait français. Aussi bien au niveau scolaire, qu’au niveau professionnel, les gens pensent franco-allemand là-bas. Moi, je voyais, on avait un copain qui était régisseur à l’opéra de Strasbourg et, les soirs de spectacle, il y avait autant d’Allemands que de Français et quand on allait à Baden-Baden ou dans d’autres villes en Allemagne, il y avait beaucoup de Français qui allaient au spectacle en Allemagne. Le plat de base, la choucroute, c’est aussi quelque chose qu’on pratique aussi en Allemagne et puis c’est vrai que, dans la mesure où il y avait déjà un brassage comme ça au niveau des constructions de villes, il y avait beaucoup d’architectes et de constructeurs allemands qui venaient à Strasbourg et vice-versa. À Strasbourg, il y a tout un quartier qui a été construit par les Allemands, donc on retrouve l’architecture des villes allemandes, ça, c’est sûr. Et puis, l’architecture traditionnelle des maisons à colombage, c’est aussi une pratique qui vient des régions de l’Allemagne.
-What struck me very much and well I’ve lived a great deal in Alsace, it’s the bilingualism, that’s to say, whether it’s through patois or German. There are a lot of Alsatians who talk German or the patois which is Germanic, so that means that you cross the frontier very easily, there’s no language barrier. And even for my wife, who wasn’t Alsatian, who didn’t talk German, she used to go to Germany and she always found someone who spoke French. Both in terms of education and professional life, people have a Franco-German mentality there. I used to see, we had a friend who was a technician at the Strasbourg opera, and on show nights, there were as many German as French people, and when we went to Baden-Baden or in other towns in Germany, there were lots of French people who went to shows in Germany. The staple diet, choucroute, is also something they have as well in Germany and then it’s true that, since there was already a lot of intermixing in terms of the building of towns, there were lots of German architects and builders who came from Strasbourg and vice-versa. In Strasbourg there’s an entire district that was built by Germans, so you find the architecture of German towns, that is sure. And then the traditional architecture of houses with wooden beams, that’s also a practice that comes from the regions of Germany.
Cet accent si particulier est hérité de l’alsacien, un patois germanique que quelques anciens tentent de sauver d’une mort certaine.
This very distinctive accent is inherited from Alsatian, a German patois that some of the older generation are trying to save from a certain death.
-Si personne ne fait rien, l’alsacien aura disparu dans 20 ans donc… seulement, on ne sait pas comment s’y prendre4 pour le faire, étant donné que la majeure partie des médias nous ont quittés. Et il faut savoir que quand il y a une révolution ou une guerre, la première des choses qu’on prend, c’est la radio et la télévision ce qui veut dire l’importance de cette chose-là. Mais enfin bon… non là, il y a un passé, un lourd passé. Quand moi, j’étais encore à l’école, tout de suite après la guerre, parce que j’ai fait deux années d’allemand c’est-à-dire sous l’occupation allemande, puis ensuite du français. Et la première année où on est allé à l’école, on nous tapait sur les mains, si on parlait alsacien, donc interdiction de le faire. Cette génération était déjà perdue. Ensuite, la deuxième génération après la guerre, les gens étaient tellement habitués à parler français, et ils étaient obligés d’apprendre le français aux enfants, de ce fait, il y a déjà la deuxième génération qui est perdue. Et la troisième, bon, la deuxième ne connaissait plus grand-chose à l’Alsacien donc les petits enfants parlaient français. Et on est là, en ce moment. Maintenant, quoi faire ? On ne sait pas, tout le monde dit que c’est dommage, mais personne ne fait rien. Maintenant est-ce qu’en donnant des cours, en étant présent, mais où ? Hein ? Parce que dans le temps, quand il y avait une fête, il y avait des Alsaciennes habillées en Alsaciennes et des Alsaciens habillés en Alsaciens. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Bref, le produit régional ne se vend plus. Si, le vin !
-If nobody does anything, Alsatian will have disappeared in 20 years so… the only thing is, we don’t know how to go about doing it, given that we have lost the vast majority of media. And it’s worth bearing in mind that when there is a revolution or a war, the first thing that gets taken over is the radio and the television, which shows the importance of that element. But well, no, in this case, there’s a past, a heavy past. When I was still at school, just after the war, because I had two German years, that’s to say under German occupation, then afterwards French. And the first year when we went to school, they used to rap us on the knuckles, if we spoke Alsatian, so it was forbidden to do so. That generation was lost already. Then the second generation after the war, people were so used to speaking French, and they were obliged to teach French to the children, and that means that there was a second generation that was lost. And the third, well the second no longer knew much about Alsatian so the grandchildren speak French. And that’s where we are at the moment. Now, what can be done about this? We don’t know. Everybody says it’s a pity, but nobody does anything. Now, is it by giving lessons, by being present, but where? Eh? Because in the past, when there was a party, there were Alsation women dressed as Alsations and Alsation men dressed as Alsations. Today that’s no longer the case. In short the regional product no longer sells. Well yes, there’s the wine!
Je m’appelle Albert
My name is Albert
J’habite là derrière
I live back there
Dans la vallée de Munster…
In the Munster valley…
Dans la vallée de Munster, ses petits villages, ses vignes, ses pâturages. Munster, c’est une vallée, une ville, et un fromage bien sûr, dont l’odeur est forte mais le goût très doux. Les connaisseurs le mangent saupoudré de carvi. C’est un délice alsacien, entre autres, avec la bière d’Alsace, la choucroute alsacienne, les vins d’Alsace, le kougelhof alsacien, etc., etc. La gastronomie alsacienne ne manque pas de richesses. Parcourez le pays dans tous les sens et vous ne serez pas déçu tant il compte d’auberges hospitalières.
In the Munster valley, its small villages, its vines, its pastures. Munster is a valley, a city, and a cheese of course, whose smell is strong but whose taste is very mild. The connoisseurs eat it sprinkled with caraway. It’s an Alsatian delicacy, among other things, along with Alsatian beer, sauerkraut, wine, and kouglehof, etc., etc. Alsatian gastronomy is not lacking in richness. Travel around the region in whatever direction you like and you won’t be disappointed, it boasts so many welcoming hostels.
L’Alsace est une région frontalière avec l’Allemagne, ce qui, les guerres dépassées, contribue au tissage d’une culture particulière. Dans son roman Le Cousin Pons, Balzac écrit : ” Fritz alla à pied à Strasbourg , et il y rencontra ce que l’enfant prodigue de la Bible n’a pas trouvé dans la patrie de la Sainte Écriture. En ceci se révèle la supériorité de l’Alsace où battent tant de coeurs généreux pour montrer la beauté de la combinaison de l’esprit français et de la solidité germanique.”
Alsace is a region bordering on Germany, which, beyond the warfare, contributes to the weaving of a unique culture. In his novel Le Cousin Pons, Balzac writes: “Fritz went by foot to Strasbourg, and he met there that which the Prodigal Son in the Bible hadn’t found in the homeland of the Holy Scripture. Here is revealed the superiority of Alsace, where so many generous hearts beat in order to show the beauty of the mix of French spirit and German solidity.”
Craignez-vous la barrière de la langue? L’alsacien est bien spécifique en effet. Car il y a l’accent, celui d’Albert l’Alsacien par exemple, et il y a aussi la langue d’Alsace. Vous en trouvez un exemple dans la chanson Der Hans im Schnokeloch que des Alsaciens reconnaissent comme leur chanson la plus populaire.
Do you fear the language barrier? Alsatian is very specific indeed. There’s the accent, that of Albert the Alsatian, for example, and there’s also the Alsatian language. You’ll find an example in the song Der Hans im Schnokeloch which Alsatians acknowledge to be their most popular song.
Der Hans im Schnokeloch
Der Hans im Schnokeloch
Saat ailes, was er will!
Saat ailes, was er will!
Un was er saat
Un was er saat
Des denkt er nitt,
Des denkt er nitt,
Un was er denkt
Un was er denkt
Der saat er nitt!
Der saat er nitt!
Der Hans im Schnokeloch
Der Hans im Schnokeloch
Saat ailes, was er will!
Saat ailes, was er will!
Pas moyen de comprendre les paroles sans traduction, n’est-ce pas? C’est l’histoire d’un mécontent nommé Jean de Schnokeloch…
No way to understand the words without a translation, right? It’s the story of an unhappy guy called Jean de Schnokeloch…
Le Jean de Schnokeloch,
Jean de Schnokeloch,
Il dit tout ce qu’il veut!
He says whatever he wants!
Et ce qu’il dit
And what he says
Il ne le croit pas,
He doesn’t believe,
Et ce qu’il pense
And what he thinks
Il ne le dit pas!
He doesn’t say!
Le Jean du Schnokeloch,
Jean de Schnokeloch,
Il dit tout ce qu’il veut!
He says whatever he wants!
Opposants, les Alsaciens ont durement vécu les conflits internationaux dont ils ne pouvaient aucunement s’extraire étant donnée leur position géographique,’sur le front’comme on dit.
Confrontational, Alsatians have lived with tremendous difficulty through international conflicts from which they had no way of escaping, given their geographical position “on the frontline” as they say.
Dans le paysage alsacien, historiquement en plus des tranchées (qui se visitent), des champs de bataille et des cimetières sans fin, se dresse le château du Haut-Kœnigsbourg qui domine la plaine du Rhin. C’est un lieu mythique où fut tourné le film culte de Jean Renoir en 1937: La Grande Illusion. Le titre est emprunté à une thèse avancée par l’écrivain Norman Angell: “la Grande Illusion des Peuples est de croire que le fer et le feu seuls les sauvegardent alors que la force du credo universel fait taire les canons.” Et le film explore la possibilité de dépasser humainement le nationalisme qui est une source d’opposition des peuples, des classes sociales, des religions. Il fallait bien toute la hauteur de Haut-Kœnigsbourg pour servir de cadre à une telle hauteur de vue.
Within the Alsatian landscape, historically – aside from the trenches (which you can visit ), battle fields, and unending cemeteries -towers the Haut-Koenigsberg castle, dominating the Rhine plain. It’s a legendary place where the cult film by Jean Renoir was filmed in 1937: La Grande Illusion. The title was borrowed from a book written by author Norman Angell: “The great illusion of the people is to believe that iron and fire alone will save them, when in fact the strength of universal belief silences the cannons.” The film explores the possibility of humanity transcending the nationalism that is one source of confrontation between peoples, social classes, religions. The full height of Haut-Koenigsberg was needed to provide a setting for such a towering vision.
Culturellement on ne peut pas ne pas parler de Jean-Jacques Waltz, dit Hansi (1873-1951), un des inventeurs de la fameuse «ligne claire», qui a donné naissance à la bande dessinée moderne. Cet artiste, dont le succès est vite devenu mondial, s’est passionné pour toutes les expressions : l’aquarelle, la publicité, le patrimoine régional.
Culturally speaking, you can’t not talk about Jean-Jacques Waltz, called Hansi (1873-1951), one of the inventors of the famous “ligne claire”, which gave birth to the modern comic strip. This artist, whose success quickly became worldwide, was passionate about all means of expression: watercolours, advertising, regional heritage.
Il a opté pour un type moderne de révolte : l’ironie par le dessin, sa propre guerre de propagande. Les caricatures impitoyables que Hansi jette à la face des puissants du moment – arrogants militaires, policiers mesquins, enseignants pédants – ont redonné l’espoir et la fierté à la population opprimée. Avec passion et tendresse, le dessinateur viscéralement engagé a conféré à l’Alsace une identité qui perdure.
He opted for a kind of modern revolt: irony through drawing, his own propaganda war. The merciless caricatures that Hansi threw in the face of those in power at the time – arrogant soldiers, petty-minded police officers, pedantic teachers – renewed the hope and pride of an oppressed population. With passion and tenderness, the artist, was viscerally committed to providing Alsace with an identity which would last.
Hansi fait comprendre la distinction essentielle entre l’attachement à une région, un pays et le danger d’être nationaliste. Ses ouvrages sont réédités. Ce sont à la fois des livres d’histoire, de langue française et des objets d’art.
Hansi made people understand the important distinction between attachment to a region, a country, and the danger of nationalism. His works have been re-edited. They are simultaneously works of history, French language books, and objects of art.
Et le présent direz-vous? Mais il s’élance à fond la caisse1 vers l’avenir avec Sébastien Loeb, pardi! Le pilote est le plus fameux peut-être des Alsaciens en ce moment.
And what about the present, you ask? Well, it’s full speed ahead towards the future with Sébastien Loeb, of course! The rally driver is perhaps the most famous Alsatian at the moment.
C’est que l’Alsace est marquée par la passion de l’automobile. Écoutez la terrible histoire des frères Schlumpf, deux grands industriels alsaciens: Obsédés par leur collection, ils avaient investi secrètement toute leur fortune voire plus afin d’acheter aux quatre coins du monde les voitures les plus prestigieuses et les plus rares.
Alsace is marked by a passion for cars. Listen to the terrific story about the Schlumpf brothers, two big Alsatian industrialists. Obsessed by their collection, they had secretly invested all of their fortune and more besides in order to buy the most prestigious and rare cars from the four corners of the world.
Mais le 7 mars 1977, en pleine crise industrielle, les ouvriers licenciés de l’empire textile des frères Schlumpf découvrant les stupéfiants musées secrets en même temps que les médias du monde entier, ont décidé de les envahir et en ont ouvert l’accès au public. C’est maintenant le plus grand musée d’automobiles pionnières du monde avec 500 véhicules dont 464 automobiles de 98 marques, dont la célèbre collection des frères Schlumpf.
But on March 7, 1977, smack in the middle of an industrial crisis, fired workers from the Schlumpf brothers’ textile empire, finding about the stunning secret museums at the same time as the worldwide media, decided to occupy them and opened them up to public access. It’s now the largest museum of pioneering automobiles in the world with 500 vehicles, of which 464 are cars representing 98 brands, including the famous collection belonging to the Schlumpf brothers.
Le syndicat CFDT organise les visites gratuites du musée à Mulhouse et le nomme « Musée des travailleurs ». Des opposants, ces Alsaciens…
The CFDT trade union organises free visits to the museum in Mulhouse and calls it the “Worker’s Museum”. Confrontational, these Alsatians…
A bon entendeur, salut!
You’ve been warned!
L’expression de l’hypothèse avec la conjonction ‘si’
-Si personne ne fait rien, l’alsacien aura disparu dans 20 ans.
-Et la première année où on est allé à l’école, on nous tapait sur les mains, si on parlait alsacien.
1) Le conditionnel
On a souvent en tête, quand on parle des fameuses phrases en ‘si’, en grammaire, une construction complexe pour exprimer l’hypothèse: si + indicatif imparfait, et une proposition au conditionnel présent dont des exemples types sont la chanson du film ‘Un violon sur le toit’:
Ah! si j’étais riche,
Je bâtirais un vrai palais…
(If i were a rich man) etc
ou bien
Si j’avais un marteau, je cognerais le jour…
(If I had a hammer…).
2) L’indicatif
Et puis il y a aussi des phrases en ‘si’ qui se construisent tout simplement avec l’indicatif, comme dans le reportage:
-Si personne ne fait rien, l’alsacien aura disparu dans vingt ans.
Dans ce cas-là nous avons: si + indicatif présent, et une proposition au futur antérieur (lequel est un temps de l’indicatif, n’est-ce pas?)
ou bien
-Et la première année où on est allé à l’école, on nous tapait sur les mains, si on parlait alsacien.
Dans ce cas-là nous avons: si + indicatif imparfait et l’indicatif imparfait encore.
La différence entre les deux constructions saute aux yeux:
Dans le cas de la construction nº1 il faut remplir une condition pour exécuter l’action :
Je bâtirais un vrai palais, si….
Le ‘si’ est suspensif, on reste dans l’hypothèse non satisfaite. On peut toujours rêver, au conditionnel!
Dans le cas de la construction nº2 on revient sur terre.
Si on ne fait rien, l’alsacien aura disparu dans 20 ans
C’est la chronique d’une mort annoncée. Si on ne fait rien, l’alsacien va disparaître (le futur immédiat étant aussi un temps de l’indicatif). C’est plus qu’une hypothèse, c’est une réalité. On ne fait pas de conjectures, on le sait et on le constate.
L’intérêt de cette mise en parallèle des phrases en ‘si’ est de vous faire sentir les nuances qui s’expriment selon que l’on emploie un mode ou un autre. Mon but est d’attirer votre attention sur l’apprentissage des modes aussi bien que des temps.
Les conjugaisons ne se limitent pas aux temps, puisqu’aussi bien il y a des temps qui réapparaissent à différents modes. Il y a un présent de l’indicatif (nous sommes), un présent du conditionnel (nous serions), un présent du subjonctif (il faut que nous soyons), un impératif présent (soyons!), un infinitif présent (être), permettant d’affirmer par exemple qu’’on ne peut pas être (infinitif présent) et avoir été (infinitif passé)! Quelle philosophie pessimiste!
Poursuivons un peu l’observation des nuances, pour mieux vous convaincre si besoin est. Prenons l’impératif de ‘finir’:
Les enfants, finissez votre travail avant mon retour!
C’est une injonction, mais
Ayez fini votre travail quand je rentrerai!
n’est pas négociable, c’est quasiment une menace, une menace à peine voilée. Revenons au deuxième exemple extrait du reportage:
-Et la première année où on est allé à l’école, on nous tapait sur les mains, si on parlait alsacien.
Sentez-vous le côté imparable, implacable? Il n’y avait pas d’échappatoire, c’était fatal: si on parlait alsacien, le châtiment suivait, c’était la dure réalité de l’indicatif.
Maintenant regardez :
-Si on avait parlé alsacien, on nous aurait tapés sur les doigts (plus que parfait de l’indicatif, conditionnel passé).
Dans cette structure il y a une possibilité d’échapper à la punition. En effet, on nous aurait tapé sur les doigts si… on avait parlé, mais la nuance est que nous faisions attention, nous étions prévenus et nous utilisions ce joker de conditionnel. Dans ce type de construction de phrase en ‘si’, avec le conditionnel, on garde une marge d’action.
J’espère vous avoir convaincus dans ce plaidoyer en faveur des modes de conjugaisons. Ne vous en tenez pas aux temps! Si vous approfondissez votre compréhension des modes, vous éviterez bien des erreurs en français usuel. C’est plus que sûr…